Vendredi 5 mai 2023
Aujourd’hui Delhaize, demain à qui le tour ?

Début mars, Delhaize annonçait sa décision de franchiser 128 magasins intégrés. Cela signifie leur reprise par un exploitant indépendant. Les 9200 travailleuses et travailleurs concernés seront transférés dans une commission paritaire pratiquant de moins bonnes conditions de travail et de rémunération et où la représentation syndicale est faible, voire inexistante. Aucune marge de négociation n’a été ouverte suite à l’annonce brutale. L’attitude méprisante de la direction du groupe n’a fait que durcir le conflit. Au bout de 7 semaines de résistance exemplaire de la part de salariés du groupe, les atteintes aux libertés syndicales se sont multipliées et aggravées.

 

Retour sur un conflit hors normes…

Dumping social, refus de la concertation sociale, fouilles des syndicalistes à l’entrée du Conseil d’Entreprise, arrestation avec menottes d’une déléguée syndicale, mépris, intimidations, arrestation et garde à vue de 24h d’un étudiant lors d’une manifestation de soutien, recours aux huissiers, à la police et aux autopompes, interventions « musclées » de la police, menaces de non-réengagement des grévistes, requêtes unilatérales validées par ordonnances de tribunaux pour interdire les piquets de grève, violation systématique du gentlemen agreement de 2002[1] … Le dossier Delhaize est hors normes à plusieurs égards et s’inscrit malheureusement dans la lignée des atteintes au droit de grève et au droit d’action collective observées depuis plusieurs années. Des ordonnances de tribunaux, qu’on croirait écrite par la direction de Delhaize, font comme si la décision du Comité européen des droits sociaux n’existait pas. Comité qui a pourtant estimé que les ordonnances sur requête unilatérale sont contraires à la Charte sociale européenne[2]

Ce n’est pas pour rien que la CSI a déclassé la Belgique dans son indice annuel des violations régulières des droits syndicaux. Des faits, rien que des faits, alignés les uns derrière les autres, montrent que ces droits sont en chute libre. Et dans leur sillage, ceux des mouvements sociaux et autres contre-pouvoir.

La jurisprudence qui est en train de se construire dans le cadre du conflit social Delhaize est extrêmement dangereuse pour l’avenir du mouvement syndical dans sa globalité. La FGTB organisera une manifestation de solidarité interprofessionnelle le 22 mai pour dénoncer le dumping social, la négation de la concertation sociale et les atteintes graves aux libertés syndicales.

Retrouvez le tract de la manifestation en cliquant sur ce lien.

[1] Gentlemen’s agreement : En 2002, un protocole d’accord conclu entre syndicats et organisations d’employeurs afin de fixer un certain nombre d’accords et d’engagements en cas de conflits sociaux. Les organisations d’employeurs s’engagent, entre autres, à recommander à leurs membres de privilégier la concertation avant la mise en œuvre de toute procédure judiciaire. Les syndicats recommandent en contrepartie à leurs membres de respecter la procédure de notification de grève (préavis) et d’éviter toute violence physique ou matérielle.

[2] Charte qui garantit le droit de grève et stipule les conditions dans lesquelles ce droit peut connaître des restrictions.

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